A l’occasion d’une expérience traumatique survenue dans l’enfance, les parts encore jeunes réagissent de façon émotionnelle et cognitive. Si elles ont l’occasion de rencontrer, au travers – le plus souvent – d’un adulte, suffisamment de compassion (que nous appellerons ici « énergie de Self dans une modalité relationnelle »), ces émotions et croyances se voient en quelque sorte régulées, métabolisées, de telle manière qu’elles ne restent pas attachées à l’expérience. Dans le cas contraire, elles demeurent « collées » à l’événement et constituent ce qu’on appelle le « fardeau » de la part blessée (ou blessure), qui la fige dans le passé.
La persistance du fardeau de la part blessée modifie non seulement son comportement, mais aussi, négativement, la façon dont elle est perçue par les autres parts. Le système psychique qu’elle constitue a tendance à se déstabiliser par rapport à l’équilibre qui était le sien avant l’expérience traumatique. De ce fait, certaines parts se détournent de leur rôle naturel pour endosser d’autres rôles dits « forcés », afin d’assurer un isolement de la part blessée au sein du système et vis-à-vis du Self, assurant ainsi un nouvel équilibre. Ces parts sont appelées « les Protecteurs », et les parts qu’elles protègent, « les Exilés ».
Les protecteurs se distinguent selon leur modalité de protection :
– proactive : il s’agit des Managers, qui veulent contrôler le système intérieur et extérieur, afin d’éviter la stimulation de l’Exilé.
– réactive : il s’agit des Pompiers, qui veulent éteindre le feu émotionnel déclenché par la stimulation de l’Exilé. Ces parts veulent anesthésier, couper du ressenti, distraire, dissocier.
Exilés et Protecteurs sont alors engagés dans une nouvelle configuration psychique qui tend fortement à perdre de sa souplesse initiale, car ses acteurs sont chargés (de leurs blessures ou de leurs rôles protecteurs) et sont engagés dans des rapports rigides (soit de protection entre Protecteurs et Exilés, soit d’alliance ou de confrontation entre Protecteurs).
A la faveur des expériences de vie, qui comportent des sources de répétition du traumatisme initial, ce système tend à se rigidifier de plus en plus. Il existe ainsi dans ce nouvel espace une souffrance primaire (celle de l’Exilé) et une souffrance secondaire nourrie par l’intervention des Protecteurs et la lutte qu’ils se livrent entre eux. Cette souffrance conditionne le symptôme, qu’il soit psychique ou physique.